• Eldalis m'a réveillée de ma léthargie, on dirait bien :p

    C'est un texte que j'ai écrit fin 2015 ; je dirais courant septembre/octobre. Je l'ai plusieurs fois repris, sans jamais le finir.
    Aujourd'hui, je me sentais de finir quelques choses, on dirait bien. 


     

    Dépression

     

    (OC : Neige Aarth)

    Un ciel d'un pâle violet s'étendait sur un canton désolé du centre de la France. Il y régnait en dictateur, aliénant une vie qui ployait sous une épaisse chape de plomb. Seule la légère brise faisait frémir le faubourg.
    Le paysage était disposé en teintes fuligineuses. Chaque couleur s'insinuait furtivement, guère criarde, du blé décimé à l'asphalte irrégulier, des arbustes frêles aux choux rancis.
    Pas même une trace nocive de l'humanité ne condensait ce calme sépulcral, trope d’un épais brouillard putréfactif, repoussant et prolifique. Cette image me confortait dans l’idée que la pire des vies ne fut pas la plus tragique, mais celle qui laissait le plus indifférent, - que l’on nomme plutôt errance qu’existence - et je reconnus là l’antipode de la Passion, de l’Amour et de l’Art.
    Non loin, une jeune femme s’ingéniait à refermer la porte de sa chaumière silencieusement. Pas même cette humaine à l'allure insouciante n'échappait à la Gangrène : la non-vie lui vouait un profond respect, et une affligeante impuissance.
    Elle émergea des artères taries. Les cailloux n'osaient pas émettre de couinements sous ses semelles.
    Les courants d'air n’étaient pas violents, mais polaires. L'automne était rigoureux, et ces bras nus, tant délicats que minces, se pigmentèrent de chair de poule. L'ingénue n'était vêtue que d'un t-shirt ample, qu'elle portait à l'instar d'une robe, tout juste assez long pour couvrir son postérieur. Dans un élan de raison, elle avait daigné garnir ses mains et ses avant-bras de longues mitaines grises, et ses mollets de bas.
    Les pompons suspendus à la fourrure de ses bottes se balançaient tels des pendules, au gré de ses pas aériens.
    La fille chassait de nombreux marasmes, qui la ramenaient régulièrement au bonheur de sa vie antérieure. Le goût de l'oubli emplit amèrement ses pupilles gustatives ; elle éprouva un saugrenu plaisir à cette sensation, ne se refusant pas à ce répit de pensées impudentes - mais une partie, un infime et ridicule simulacre d'elle, éprouvait un soupçon de frustration.
    La gangrène nie que le temps passe à une vitesse folle sous sa monarchie, éthéré, impalpable et monotone ; que, d'une prévoyance inquiétante, elle avait poli les semelles de la jeune fille, afin qu'elles se marient à l'accalmie étouffante de ces lieux.
    La gangrène, influente, insuffla à la demoiselle de réfuter le son du clocher, annonciateur de l'hiver. Ce mois de décembre décisif, deux ans auparavant ; la joie embryonnaire à la vue de quelques particules blanches parmi les nues - et cet heureux sentiment qui s'échappait de son âme à mesure que les particules abondaient.
    Elle n'avait plus aimé la neige, ni toute nature. Cette passion s'était évanouie, confusément et sans raisons apparentes.
    Elle n'avait plus aimé la compagnie et la solitude, qu'elle chérissait tant. Elle n'avait plus ressenti l'harmonie d'un être équilibré, ni l'ambition, et se caractérisa par une neutralité quasi-constante, et affligeante.
    Cet hiver, son coeur s'était gelé, et son visage s'était mu d'une sournoise ataraxie... Et plutôt que de réfuter l'intégrité de son existence, elle réfuta son passé.
    Rien ne semblait pouvoir interrompre la funèbre et pressante ascension du temps. L'oubli fit de seize ans une piètre seconde. L’oubli fit d’un humain conscient un papillon éphémère, naissant et mourant perpétuellement... Affolé, indécis, mais droit. Avançant péniblement, et bientôt sans repères, mais avec un affairement exemplaire.
    Ses iris furetaient, impassibles et sombres, dédaignant cet environnement trop familier.
    Il y a longtemps qu’elle n’avait pas pris plaisir à ces balades matinales, pourtant, elle n'avait pas cessé de prendre une marge de vingt minutes le matin, avant de se rendre au lycée, ne serait-ce que pour ne pas marquer de cinglante différence entre son ancienne vie et celle qu'elle menait alors.
    L'aube ternissait davantage les environs. Les arbres s’amoncelaient en de noires silhouettes dont les branches formaient un kaléidoscope de ramures. Des moutons de nuages s'agglutinaient à la verdure et camouflaient les champs agricoles, qui n'apparaissaient que par gerbes de jaune crasseux ou de vert fade. De temps à autre, elle percevait les croassements de quelques corbeaux, un bruissement dans les buissons de l'épaisse forêt qui bordait la route.
    La jeune fille s'assit sur la chaussée, au pied d'un lampadaire encore allumé. Ainsi adossée, elle releva le menton pour jeter un œil abattu à la voûte céleste. Une vague émotion l'envahit. Elle venait tout juste de remarquer le violet parme de ce dernier. L'expression de la lycéenne, d'ordinaire figée, changea un instant : elle écarquilla les yeux, qu'un de ces fugaces sentiments altérait parfois, et entrouvrit lentement ses lèvres gercées.
    « Peut-être que quelque chose me ressemble, et que je ne suis pas la seule à être si atone », songea-t-elle, en esquissant un léger sourire.
    Elle tendit le bras, comme pour attraper ce ciel-là, dont elle se prit d'une aussi singulière que subite affection.
    Bientôt, l'aube crût et rougit la campagne froide. Le doux parme était désormais diapré de tons chaud, et finit par se noyer parmi leur vivacité anodine.
    Elle avait abaissé son bras, et se sentait un peu pathétique. La réminiscence du bonheur qu'elle éprouvait à l'annonce d'une nouvelle journée ne fit que réhausser le sourire ironique qu'elle arborait. De son sac en tissu, elle sortit des lunettes rétro rondes. Elle les scruta quelques secondes entre ses mains, sans se souvenir de qui elles lui provenaient, et finit par ignorer ce détail, qui l’aurait probablement mise à quia si elle avait daigné y réfléchir. Elle les plaça sur son fin nez. Grâce aux verres, le ciel fut de nouveau froid, mais elle n'éprouva pas d'intérêt pour cette imposture.
    Autour d'elle, une quantité colossale de spectres s'était amassée. Ils semblaient jouer un rôle clé dans la quotidienne décadence de l'humeur de la fille - tant d'esprits déchus, affamés d'existence comme de nourriture. Leur enveloppe se distendait continuellement, difforme, muant tantôt en une silhouette humaine, tantôt en un halo épars, pétrifiée dans une expression d'affliction.
    À contrario des mânes, fluides et homogènes, les spectres se composent d'une infinité de corpuscules pourpres.
    « La Géhenne. »
    Malgré mon incapacité à lire les sentiments des âmes des morts, leur souffrance m'éventra subitement, traversant la diaphanéité de mon étrange corps - ni vivant, ni mort, ni humain, ni animal ; autre, inconnu -, qui se compressa de telle manière que je crus presque exploser d'une pression trop forte. Alors, je priai, caressant l'espoir d'apaiser ces âmes torturées. Ce phénomène surpassait de loin la télépathie : c'était une terrible empathie.
    Les émanations s’agitaient d'un entêtement enfantin sous les yeux de la fille, qui ne leur prêtait aucune intention, rivée sur son téléphone, qui peinait à capter quoi que ce soit ; j’aimerais pouvoir mettre exclusivement en cause sa mémoire défaillante. À mesure que le tohu-bohu des spectres allait, à mesure que son téléphone se refusait à charger sa page, son front se plissait nerveusement. Elle se releva brusquement, non sans jeter un regard furieux à la horde de spectres, et poursuivit sa marche d’un pas vif comme ceux des humains bourrus.
    « La… (elle emplit ses poumons d'air) ferme ! »
    Ses paroles eurent pour effet de faire cesser le tohu-bohu de la horde ; pourtant, la jeune femme n'était pas bien imposante.
    Déjà, la colère de la fille s'était apaisée, laissant place à son calme placide habituel. Elle soupira et disparut lentement dans la brume matinale.


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  • Je sens que je peux confier beaucoup de choses à Thérapie du Bonheur. Peu de personnes se perdront à la lire, et je leur fais confiance. 

    Extrait de mon journal


    A celui qui riait fort - et qu'on a tué

    (OC : Shikabane Junsee)

    (Groupe : The Ocean
    Album : Pelagial
    Genre : Post-Metal)


    Jour 174 (27/02/2017) :

    Il faisait noir.
    C'était le noir complet.
    Est-ce que j'ai quelque chose à tirer du noir ? Non. Meublons ceci.
    Un peu de musique.
    Dois-je mettre une musique que je connais bien, à laquelle j'associe des souvenirs ? Ou une musique à laquelle associer de nouveaux souvenirs ?
    Très bien ; replongeons dans le noir.
    La vie est étrange, n'est-ce pas ? J'ai peur de ce que peut bien être la vie... C'est-à-dire, une vie dans laquelle x a été assassiné ; une vie dans laquelle j'ai des fantasmes inappropriés ; une vie où je suis mal à l'aise durant une soirée.
    Une vie où je perds mon talent.
    Je radote. N'ai-je plus de maximes à écrire ? De vérités à traduire ? Non ; je n'ai plus que des questions, semble-t-il.
    Je me souviens de ce message
    x est mort
    x est mort
    x est mort
    x est mort
    x est mort
    Je me souviens que le mot "mort", quoiqu'il m'ait heurté la première fois que je l'ai vu associé à x, a fini par perdre de son sens. Je me souviens, il y a longtemps, avoir pris y dans mes bras, l'avoir sentie pleurer
    Mais est-ce assez réel ? Pourquoi est-ce si difficile à réaliser, même après avoir assisté à la cérémonie ?
    Est-ce que j'ai assez conscience que je vis ?
    [...]

    Jour 172 (07/02/2017) :

    J'ai l'impression que x est juste parti. Qu'il est juste parti prendre l'air un instant, un insupportable instant. 
    Mais x ne reviendra plus. x ne reviendra plus jamais.
    C'est cela que signifie le mot "mort". 


    Jour 171 (02/02/2017) :

    Le cercueil était blanc. Blanc d'innocence, blanc d'enfance, blanc d'une mort prématurée et blanc comme son cadavre. Il était blanc, et nous étions tous noirs. 
    Aujourd'hui, nous allons enterrer x. Faire les derniers adieux, rendre les derniers hommages. Je pleurerai sans doute les dernières larmes pour recueillir une nouvelle vision du monde : celle d'une vie cruelle et difficile, qui avait eu raison de x.
    Nous allons enterrer son sourire espiègle, son rire aiguë et communicatif, sa générosité et son impulsivité. Nous allons enterrer une partie importante de la vie d'une famille que j'aime profondément. Mais la peine de mes amis, elle, ne sera pas enterrée avant un moment et les souvenirs, jamais. 
    Nous avons tous changé. Nous voyons tous les choses différemment, et prenons conscience de ce monde chaotique. 
    Nous faisons plus attention à la mort, au sang, aux crimes autour de nous. 
    Et plus que tout, notre fragilité nous apparaît comme évidente. Les rêves, les projections que nous nous faisons sont sûrement plus des aspirations que des objectifs réalisables. À l'aube de la réussite, il se pourrait que la mort emporte tout.
    J'ai l'impression de revoir, ainsi. Que les couleurs sont aussi vives qu'elles l'étaient il y a de cela trois ans, et de me réveiller de ma léthargie. Demain, je ne serai peut-être plus là. Sûrement partirai-je sans avoir accompli ce pourquoi je suis née. Nous avons le droit de trouver la mort triste, mais je ne voudrais pas que ma mort soit vécue avec tristesse, peu importe la manière dont elle surviendra. 
    Aujourd'hui, j'ai réalisé qu'il y avait des gens que j'aime, que je souhaite rendre heureux et protéger.
    Je suis née pour rendre le monde meilleur ; je ne mourrai pas pour l'emplir d'encore plus de tristesse.

    Jour 175 (28/02/2017) :

    Parfois x j'ai l'impression
    Que je t'utilise
    « Je n'ai pas pu rendre mon devoir maison d'économie, j'étais à une cérémonie »
    « Je le connaissais »
    « Je vais en profiter pour voir y plus souvent et lui montrer que je suis là »
    « Je vais pouvoir justifier mon mal-être. Demander de l'affection me sera plus légitime »
    Parfois, j'ai honte. Je confonds des souvenirs ; des souvenirs qui n'étaient pas en ta compagnie, mais en celle de ton assassin. C'est si flou dans ma tête. Le temps, le présent, le passé... Tout ça finit par n'être que confusion, confusion insensée. 

    Jour 178 (05/03/2017) :

    L'autre jour, x
    J'ai cherché ton prénom 

    Je ne l'avais jamais cité que pour te critiquer.

    Jour 175 (28/02/2017) :

    J'en suis désolée. Je donnerais cher pour que tu sois encore là. Devant ton ordinateur, à traduire des animes pour toujours. J'ai encore la clé USB que tu m'avais donnée en mai dernier, avec Nagi No Asukara. Devant ma mine déconfite suite à ma rupture, tu avais voulu me changer les idées. Bien que je n'aie pas apprécié outre mesure cet anime, sache qu'il m'a remonté le moral. J'ai encore beaucoup de choses à regarder d'une très bonne qualité, grâce à toi.
    Lorsque j'allais voir y, tes fonds d'écran de nekomimi, de lolis, de yuri, la plupart du temps ecchis, défilaient sur le téléviseur de ton ordinateur, ce qui me faisait ricaner. Lorsque tu étais là, je me souviens de ton regard en biais, espiègle, tes « Oh non, elle est trop mignonne ! », tes « Haha ! » retentissants et communicatifs, ou ton obstination à différencier les yeux vairons des yeux hétérochromes.
    Je donnerais cher pour qu'on aille tous ensemble au cinéma, une dernière fois. Vite, avec ta voiture, comme une attraction, surtout sur les dos d'âne. On irait avec mon kigurumi et mon sac à dos tigre, et Ophélie avec sa peluche Rilakkuma, parce qu'on aime se faire remarquer, qu'on est clichés, sans vergogne. On irait même au Mc Do. Je pourrais croquer dans un hamburger carné, si cela te faisait plaisir.
    Juste pour être à Ω:1, il y a quelques années de ça. Que tu nous paies encore une glace ou une crêpe, des frites ou un Mc je ne sais quoi.
    En rentrant, on regarderait Dragons 2. On pourrait aussi aller refaire du Karting à s'en péter le dos, ou chanter dans la rue à Ω:2. Au moment de dormir, tu me prêterais même ton dakimakura de Ikaros. J'ignore pourquoi je me sentais bien avec Ikaros dans mes bras.
    Tout serait comme avant. y, x, u et un de ses mecs, et même w, au cinéma. Pas de a ; bien que ce garçon fasse le bonheur d'y, c'est parce qu'elle ne cesse d'être avec lui qu'on ne se voit plus, elle et moi. Ça, tu l'avais sans doute remarqué. Tu me demandais pourquoi je ne venais pas plus souvent... J'aurais aimé, x. Comme j'aurais aimé.
    Juste que tout soit comme avant. De bonbons, de gâteaux, d'animes, de rires, de danses loufoques ; trêve de sang, trêve de meurtre, de mensonges.
    J'ai si mal au coeur ; parce que tout ça ne sera plus jamais comme avant, toutes ces choses qui furent mon bonheur d'adolescente ne sont définitivement plus.
    Le temps s'est comme arrêté en 2015. Je n'arrive plus à regarder le temps en face depuis lors. Je vis en rétrospective, ou simplement en me répétant que le temps passe trop vite. Le temps est une poule à laquelle on a coupé la tête, et elle pisse le sang de partout depuis que tu es mort, x.

    Jour 174 (27/02/2017) :

    [...]
    Avec n, hier
    Il y avait comme un sentiment de désertion
    Nous étions les deux seuls humains restants de Ω:3
    Alors on essayait de faire remarquer notre présence
    Des yeux
    Des yeux
    Des yeux
    Une présence qui reste
    Qui résiste au temps, un temps
    Puis qui, comme nous, disparaîtra...
    Il y a quelque chose que je souhaite laisser sur Terre
    Une histoire
    Celle d'Intro Spectrum
    Mais Intro Spectrum, l'histoire où tout est possible,
    Connaîtra-t-elle ne serait-ce qu'un chapitre ?
    Et si je réécrivais ?
    h
    h
    h
    h
    Je voudrais que
    Tu me complimentes
    Que tu sois fier de moi, en quelque sorte
    Est-ce que j'aime h
    Ou l'image qu'il me renvoie ?
    Quelle importance, de toute manière.
    Les choses sont étranges
    Dieu qu'elles sont étranges
    J'ai aimé m, vraiment
    Mais je ne m'en souvenais plus
    J'ai besoin de retrouver mon essence
    Rechercher mon moi profond
    Perdu dans le quotidien

    La nuit, la vie est bizarre sans bras dans lesquels se blottir

    Je dois réécrire
    Je dois réécrire
    Je dois réécrire


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