• Ta main dans la mienne comme une solitude en commun. Ton vif regard déconstruit le miteux de mon esprit, plaque les murs gris de rires, de sourires et de baume au cœur. La certitude de ta présence est le réconfort d'une vie étrangère ; bientôt, tu deviens le seul foyer que je désire, foyer de l'inaccoutumé et des couleurs vives et d'un moi infiniment différent.
    Mon calme placide camoufle cette envie de te déchirer et de te trouver, mon abreuvoir, éclat brut de pensées.
    Tes grands yeux sans gêne, peuvent-ils saisir la soudaineté et l'ardeur de mon âme ? Tes grands yeux sans gêne, sont-ils capables d'aimer avec brutalité ?
    Comment un flegme peut-il être aussi incandescent ?
    Il n'y a qu'un poète pour faire d'une étincelle un brasier.
    Tu me fais brûler, je savoure. Calcine-moi, je serai ton allumette. Lentement, mot à mot, tu joues avec ma peau inflammable. Qu'importe, devenir tas de cendres, c'est pouvoir mieux t'admirer.
    Je ne te connais pas, auprès de toi, je sacrifierai encore.
    ----------------------


    Je somnolais en toute béatitude - ce qui, de surcroît, est extrêmement rare - lorsqu'une pensée vint, car il le fallait, car la béatitude n'est pas permise, perturber mes songes. Un violent claquement de porte propulsé par le vent tonna contre mon âme et éparpilla mon être en de myrillions d'atomes en détresse. Des atomes qui s'agitent, des atomes qui s'impatientent, des atomes terriblement en colère, des atomes qui se lamentent, certains qui pleurent et d'autres qui se tapissent dans la peur ; tout ceci pour une seule petite, piètre, pauvre âme. Tout ceci pour une seule question, une éventualité qui retapisserait tous les murs d'un morne gris, mes mains de solitude et mon cœur de désertion.
    Et s'il trouvait meilleur que moi ?
    Je me suis retrouvée là, ma main dans la sienne, par totale contingence. Une goutte de nécessité pouvait le mettre dans le chemin de personnes meilleures que moi.
    Alors, je ne serais que le « p'tit chat » qui attend incessamment à la maison que son maître revienne ; qui, la nuit tombée, serait enfin, et tristement, gratifié d'une caresse désinvolte. Moi, je ne souhaite pas trouver meilleur que lui. Peut-être serait-ce humainement possible. Peut-être, mais personne n'a autant le pouvoir d'unifier mes atomes en une puissante molécule de dopamine.


    ---------------------
    Même le dragon s'est embrasé
    Et dégueule Eros à tes pieds
    ---------------------


    Ton regard est impitoyable dans la pénombre
    Il sonde ma tristesse et s'enquérit
    Pauvre petite chose
    Et un mouvement de la pitié te pousse
    À t'emparer de mes lèvres
    Un instant déchirant
    Et tu t'en vas


    ---------------------


    Quel est le sens de ce feu ?
    Alimente-t-il quelque foyer ?
    Permet-il de cuire quelque chose, de réchauffer quelques parvenus ?

    Non, ce feu-là
    Il ne sert à rien.

    Ce feu-là brûle les âmes
    Brûlés, les amis et les amants
    Brûlés, les parents
    Brûlés
    Brûlés brûlés
    Brûlez !

    Un rictus
    Mes iris incandescents
    Sans aucune pitié
    Quelles belles offrandes !
    Tout a brûlé.

    Moi, calcinée
    Par mes propres feux
    Chaque mot, toujours plus calcinée
    Mon regard morne et lourd croise ton sourire éternel
    Assassin !

    J'ai envie de le déchirer, cet insolent
    Puisqu'il ne m'est pas destiné
    Il ne le sera à personne
    Cesse de vivre autant
    Cesse de vivre autant de tout !
    Tais-toi, donne-moi ce silence songeur
    Enfin, vis pour moi, un peu !

    Moi, je ne vivais que pour toi

    Mais qu'étais-je sinon
    Un corps à enlacer
    Une bouche à embrasser
    Une enveloppe sans âme
    « à prendre ou à laisser » !


    Rien d'autre... Rien d'autre !


    ---------------------
    Amoureux de la chair
    Ton esprit, mon amant
    Grave sur mon âme comme sur ma peau
    Cette déchéance proprement poétique
    Je m'y abandonne, et à toi
    Dans ton œil salace mon œil las
    trouve sa félicité

    --------------------- 

    Tu prends de la place pour quatre
    Les amis comme des pommes mûres
    tombent nonchalamment, fatalement
    Et moi qui les rattrape en hâte
    D'ordinaire, je les regarde s'écraser avec stupeur
    A mes pieds, quatre pommes
    J'avance te retrouver vers la cime
    Une pomme se heurte à ma semelle, dévale la colline

    Toi, les pommes, tu en fais de la compote


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  • Je suis revenue vers toi car il n'y a plus personne pour lire ce petit bout de moi. Tu n'es pas quelqu'un, mais tu es au moins l'espoir d'un œil las.

     Jour 220 (12/07/2018) : 


    Je sens la poésie étreindre mon cœur
    La vacuité de la vie
    éphémère ; qui, incoercible
    se consume au creux de ma main
    J'espère que ses baisers humides me sauveront de la sécheresse de mon âme
    De l'amertume d'être laissé à soi-même comme avec ce qu'on fuit
    Insoutenable voix plaintive qui murmure
    À l'aide
    viens me sauver de mes démons
    Je retarde l'échéance, j'annihile mes pensées par des mécanismes
    Je glane un sourire, quelques rires
    face à moi, toujours
    Le vide d'une place
    Et les larmes
    qui viennent peupler mon visage

    Jour 221 (12/07/2018) :

    J'observe le ciel étoilé
    Le cœur toujours enserré dans un étau
    J'avance perdue
    Les murmures résonnent entre les murs désolés
    Silhouette solitaire, rues familières
    Et pourtant, étrangères dénuées de leurs âmes
    Intense sentiment de désertion.
    Les jours s'en vont, je demeure
    édifice parmi les sépultures

    Jour 222 (17/07/2018) :

    Les étoiles me dévorent du regard
    Accentuent la désertion de mon cœur

    Elles ont tout vu, insensibles

    Jour 223 (05/08/2018) :

    Je me sens hantée comme une vieille cabane
    Bout de ficelle qui chancelle
    Et répand la mort parasitique partout
    Sur mon corps étendu,
    Crasseux et gras, flegme et incapable
    Je somnole, agitée
    La porte s'ouvre sur ton visage familier
    Sur ton sourire salvateur
    et impitoyablement
    éphémère
    Toutes ces réalités s'en vont
    Celle de la masse pendue, celle du travail inachevé et de la maladie
    Seul le bonheur
    Entre tes bras plus rien d'autre n'a d'importance
    Mais tu t'en vas, aujourd'hui
    Je ne suis plus habitée que par ce souvenir mélancolique

    Jour 225 (17/08/2018) :

    Je sens mon âme spiraliforme dans ma poitrine. Aussi spliraliforme que mon corps horizontal sur ce lit de fainéantise qui est comme mon lit de mort.
    Le temps passe et je ne fais rien pour le rattraper. Fausses promesses sur fausses promesses, déceptions sur déceptions, malheureuse complaisance. Les jeux-vidéos et les réseaux sociaux sont mon nœud coulant. Ils préparent mon échec certain. Je continue de couler ; jusqu'ici tout va bien. Je ne peux qu'avoir peur en attendant la chute.


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  • Il fait sombre.

    Très sombre.
    Je ne crois pas qu'il existe d'endroit plus sombre que celui-ci. Plus obscur encore que la Géhenne, suspendu dans une dimension négative qui n'appartient ni à l'au-delà, ni à l'en-deçà.

    Le vide absolu. Le négatif de la vie, le vide.

    J'admets, c'est difficile à concevoir. Vous êtes des êtres sentients, des êtres de sensations, et c'est là vous demander de ne pas sentir. Et j’ose supposer que nombre d’entre vous préfèrent encore la vie au vide. Je n’aime pas l’idée que le trop plein de sentience puisse amener des êtres à s’en remettre à moi, maîtresse incontestable du vide, par inconvenance.
    Je suppose que je me suis mise à découvert, maintenant. 

    Je suis la Mort.
    Et vous vous apprêtez à pénétrer mon humble demeure.

     J’ai toujours aimé les contentions, les artifices. Elles inspirent les poètes. J’en ai sans doute l’essence.
    Constatez : le mot « mort » est nébuleux, ainsi que nombre d’expressions, d’adjectifs et noms communs qui en dérivent ou qui en sont synonymes. La faucheuse, elle, est vaporeuse. Il ne m’a pas encore été donné de rencontrer un artiste qui m’ait dépeinte sous des traits précis, détaillés. Certes, je baigne en permanence dans une obscurité parfaite, mais elle ne signifie pas que je n’ai pas de visage, ou qu’il n’est pas charmant.
    Il vous suffirait pourtant de m’éclairer.
    Vous que j’ai vus si souvent effrayés du noir, il semblerait que je fasse exception à la règle.

    Si les humains étaient plus pragmatiques, ils diraient « Cet être vivant n'existe plus ». Sobre. Franc. Il n'y aurait pas de mystère, pas d'autres interprétations possibles.
    Souvent, l'humain a préféré rechercher la prolongation de la vie, s’infligeant là l’auscultation méticuleuse des cadavres. Et ce dernier de déclarer à la suite de l’analyse, quelque peu paniqué : « Je vois quelque chose. Je vois une âme s’exhaler, s’en aller terriblement loin, hors de portée de nous tous, et vivre. Elle fait 21 grammes » devant l’angoisse communicative de ses compères. Imagination sélective : peu fructueuse dans la considération de la mort, abondante dans la conception de spiritualités biaisées.

    Vous vous en doutez, les humains sont crédules. Et si les religions ne sont pas le prétexte de domination, de colonisation, de conquêtes, de croisades, alors, elles sont le prétexte de ceux qui nient l’existence du vide, qui pourtant pourrait à tout moment s’enquérir d’eux. Il leur faudrait mettre au moins autant de soin dans la conceptualisation du vide qu’à l’élaboration de mythes attendrissants. Cessez de fixer anxieusement vos pieds et observez le firmament. Vous n’y verrez pas de l’herbe, et des fourmis et des gendarmes y grouiller, mais un simulacre des accueillantes portes de ma demeure.
    L’univers, la pléthore de non-vie ; il faut tant de peine à la vie pour s’y faire une place. Et l’humain, qui n’excelle que dans l’ethnocentrisme, aime à se faire appeler « être de raison », mais n’en use toujours pas.

    Bien que j’eusse préféré que la sagesse d’Epicure touche davantage d’humains, je dois reconnaître que les voir s’épargner les tourments que cause la mort m’ôte en culpabilité. Les tourmentés me parviennent, tout putréfactifs et déboussolés qu’ils sont, et le spectacle qu’ils offrent alors serait ébranlant  pour le plus stoïque des stoïciens. Souvent, ils observent confusément le vide absolu, leurs yeux aveugles grands comme des soucoupes.  Ils marmonnent des choses comme : « Il est là. Il est là, ce vide que j’ai craint toute ma vie », de nombreuses fois, pour faire peser les mots autant que les marasmes.
    Et du haut des myrillions de non-vies de mon manoir, si, d’ordinaire, j’aurais rétorqué au tourmenté que son visage m’était familier, que je l'avais détaillé déjà des milliers de fois dans d’autres lignes d’univers et dans des états tous plus moribonds les uns que les autres, qu’il n’y avait donc pas matière à angoisser ; là, je me taisais solennellement et ne puis que me réjouir du noir, qui lui épargnait un sens : la vision de son macchabée.
    Semble-t-il que pour les êtres de passions, la pire des afflictions puisse être la privation de sensations.

    Les nouveaux-morts – reconnaissables à leurs cordes vocales encore fonctionnelles- en profitent pour houspiller les tourmentés de questions. S’ils n’ont pas d’yeux, leurs trous d’orbite affectent une forme d’inquisition. C’est que l’on oublie vite ce qu’était la vie, lors même que l’on ne se trouve que dans le jardin de l’exuvie. Les paroles à l’effluve de vie sont des bouffées d’oxygène pour ceux qui peinent à respirer.
    « Comment c’était, d’être ? » demandèrent-ils en cœur avec difficulté.
    De son visage déjà vide, dénué de dents et de globes oculaires, l’humaine s’échina à répondre, lentement, en butant sur les mots, tout en tentant de retenir les morceaux de peaux sanguinolents qui suintaient de son crâne.
    « Plein de couleurs. Plein de couleurs, mais surtout des couleurs fades.
    Et éphémère. Avec un triste arrière-goût d’injustice.
    - Et comment c’était, de ne plus être ? demandèrent-ils d’un ton égal.
    - Plein de surprises. Plein de surprises, mais de surprises faites de plomb. Cette arme, c'était du plastique, quatre explosions en moins. Si vous aviez des yeux, vous pourriez sans doute les voir, logées dans ma poitrine et mon cerveau. Elles rendent tout immense et rouge. Son regard est immense, et quand je le croise, il tire à nouveau. Et là, c'est noir. Je sens mon corps flasque, l’expression que j'arbore en-deçà, crevée sur le perron, doit laisser à désirer. Plus personne ne va me reconnaître. J'espère qu'il va nettoyer. »
    Bientôt, sa voix ne fut que déglutitions et raclements de gorge laborieux. Celle-ci s’était faite trop bavarde, et elle avait avalé toutes ses dents sans même s’en rendre compte. Quelques nouveaux-morts étouffèrent alors un rire nerveux, avalant quant à eux leurs dernières dents.

    L'édentée s'avance hasardeusement, avec conviction, puis tâtonne afin de trouver la poignée des larges volets. Son enveloppe corporelle, sa mue de reptile, impropre, siffle et s’évapore comme l’eau chaude d’une théière. Des nuées fuligineuses s'en échappent et ne laissent plus qu'une silhouette opaque, lisse et noire.

     

     

    Alors, en quelques millièmes de secondes, elle est happée par le vacuum, et plus aucun pronom ne peut lui être attribué.


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  • Junsee avait roulé un joint. C'était de la beuh thérapeutique, soit disant, qu'on prescrivait à tout venant pour calmer les ardeurs sentimentales.
    Elle exhalait sa fumée doucement, solennellement, imaginant qu'elle lui conférait une certaine contenance d'écorchée. Elle fixa la capsule d'isolation sensorielle d'un regard livide. L'isolation sensorielle faisait aussi partie de son traitement, et aujourd'hui, cela l'ennuyait de devoir s'y soumettre.
    Elle avait envie de vaquer à ses pensées en toute conscience ; enfin, le niveau de conscience après avoir fumé un joint, du moins. Ses pensées étaient devenues molles et cotonneuses. Elles ne la faisaient plus souffrir, même si elles pouvaient, fondamentalement, amener à de tristes constats.
    Elle songea au garçon. Elle ne l'avait pas vu depuis près d'un mois, et sentait sa frustration croître. Lui qui lui avait fait oublier ses maux l'espace d'un instant... - elle inspira une latte et imagina ses bras autour de son corps frêle. La vie avec lui. Elle ne s'inventa pas un amour fou - c'était même platonique -, mais il régnait une infinie tendresse d'autant satisfaisante. Cette idée lui plut énormément. C'était un être si charmant ! Tout a l'air toujours si plaisant avec les êtres charmants. On se sent privilégié d'être à leurs côtés et tout se colore sur leur passage. Ils ne laissent jamais de marbre ; tout son contraire, entre autres, puisqu'elle était de ces assistés malades mentaux que la société engendre en trop grand nombre et qui n'ont d'éminent que leur insignifiance.

    ___ 

    Le corps de Junsee frissonnait au contact de l'eau chaude. La baignoire en marbre, bordée de toutes sortes de produits de soin, lui donnait une impression de petitesse. Si son corps disgracieux ne s'était pas étalé devant ses yeux, peut-être qu'elle aurait pu apprécier cet instant. Dans ses rêves, Junsee n'a pas de corps. Elle n'est qu'une âme, flottant avec légèreté.
    Dans la réalité, Junsee se sent misérable. Ce n'était pas nouveau ; elle se savait si dure à contenter. Le garçon lui avait redonné de l'espoir, récemment, mais il le lui avait très vite repris. En découlait une frustration quotidienne, en plus de la dépression habituelle. Junsee ne pouvait s'empêcher de penser qu'il manquait quelque chose à sa vie. Cette impression la suivait en permanence, sans qu'elle puisse soupçonner quoi que ce soit de pouvoir y remédier. Elle la sentait grandir dès qu'elle croisait quelque chose qui ait à voir avec le garçon ou qui le lui évoque, même si, d'une certaine manière, elle recherchait cette présence. C'était lui qui l'avait approchée de prime abord, après tout. Pourquoi fallait-il qu'elle soit moins bien qu'une personne qui n'existe même plus ?


    Junsee rouvrit les yeux. La pièce était pleine de vapeur. Elle redressa son corps ruisselant d'eau et sortit de la baignoire en ignorant les serviettes pendues le long de sa salle de bain. Elle était si chétive, que, nue, elle ne sentait plus son corps. Il lui semblait parfois qu'elle n'avait pas besoin de mourir pour prétendre à la légèreté : il lui suffisait de ne pas manger.
    Elle tournoya joyeusement dans sa cuisine, qui offrait une vue monstrueuse sur La City, ses plus imposants buildings, ses lumières intrusives. Avec un énorme vis-à-vis, de fait. Qu'y avait-il à voir, de toute façon ?


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  • Je ne pense à rien.

    Ma tête s'affaisse sur la table, je jette un regard à l'intense bleu du firmament à travers la vitre. Il n'y a pas un nuage dans le ciel. Les bruits des niveleuses et des bétonneuses étouffent ceux des grillons, des cigales, des criquets.
    C'est toujours la même vue qui s'offre à moi. Celle de la salle C36, 3ème rang à côté de la fenêtre. La cour, des champs, des maisons, des autoroutes, et, plus loin, les montagnes (les Alpes, j'imagine). C'est déjà mieux que par temps de pluie.

    Toujours, je ne pense à rien.

    À côté de moi, la chaise a été vide toute la journée. Sans ce flot de paroles, souvent réprobatrices, j'ai somnolé. Ce fut agréable. J'ai retrouvé ma solitude ; il ne me reste plus qu'à retrouver mon inspiration.

    Car je ne pense à rien, et que l'humain, esseulé, devient artiste pour peupler ses idées.

    Je suis figée, mais je dérive à toute vitesse. Je suis une âme lointaine, si lointaine. L'océan s'étend à perte de vue, il est bleu, il est pur, et les couleurs y sont criardes. J'aperçois bientôt les tropiques. Cette vision est paradisiaque, je m'y sens paisible, mais elle ne m'émeut pas. Je ne sais plus où se trouve le navire de mes contemporains. Sans doute ne le regagnerai-je pas. Je demeure sans troubles, sans peines, sans émotions ; tout est rond, lisse, fluide, et ne m'évoque pas grand-chose. Je suis dans l'ataraxie.

    Il est probable que j'aie pensé à quelque chose à cet instant-là, mais j'ai dû l'oublier.

    Derrière moi, il y a sa voix fluette. C'est la seule que j'entends encore. Elle est douce, pleine de candeur, et me ramène à la pureté de cet être-là. Elle porte un t-shirt rose pâle. Je la complimente ; je pourrais me confondre en compliments à son égard.
    Elle est si parfaite, et moi, je suis si bizarre. Comme si mon absence de charisme était imprimée sur ma figure ; cette absence de charisme, ce sont ces myriades de trous qui transpercent ma peau. Alors, la substance qui me compose ne filtre pas onctueusement à travers mon enveloppe ; elle se déverse pathétiquement sur le sol à mesure que la journée avance, et, sans surprise, il n'en reste rapidement plus grand-chose. Plus grand-chose, c'est-à-dire cette demi-vie,  opaque et insignifiante. Mon corps n'a jamais été apte à honorer la grandeur de mon âme. J'apparais aux yeux des autres comme une personne ennuyeuse et fade, et à mes propres yeux, comme un simulacre, un simulacre qui me prive de ma liberté. Elle a de la chance, elle n'est jamais le simulacre de quoi que ce soit, elle semble constamment pleine de vie, naturellement.
    Là, elle parle. Elle arrive à parler.

    Je ne dis rien. Il est d'humains qui savent nous faire penser à quelque chose.

    J'échange des paroles, mais elles sont creuses. Je tisse des liens, mais ils sont superficiels. Par ce soleil de printemps, j'avance seule, et je réalise que s'entourer est une chose bien différente que d'être connectée au flux des âmes. Je ne capte personne sur ma longueur d'ondes. Ce vide instaure une ambiance particulière. J'en veux aux personnes qui m'entouraient d'être parties ; elles seront remplacées, j'entends leur désintérêt devant cette enveloppe monochrome, mais toujours​ fuse la rancoeur. Leur présence est encore imprégnée dans les pores béants de ma peau, leur présence est une odeur d'ail persistante qui jadis eut un goût à en faire vibrer tous mes sens, mais n'est guère plus qu'une réminiscence désagréable.

    Il n'y a que la Nature. Elle semble faire de son mieux pour me ravir depuis toutes ces années, car la Nature ne trahit pas.

    Peut-être que j'aurais mieux fait de continuer à ne penser à rien.


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  • C’était un monde sans couleurs, entièrement de nuances noires et grises.
    Chaque jour s’y profilait à l’instar d’un long gémissement ; cette amertume éparse et continue, entretenue sous le joug de la monotonie. La maladie faisait des souvenirs des réminiscences, flous et fugaces ; et puis, quels souvenirs pouvait-on créer dans ces conditions ? Des souvenirs monochromes ? Des souvenirs solitaires, lovés confortablement sur les parois abysalles du creux de la dépression ?
    Et pour seule délivrance, les adieux de l’unique âme qui eut tenté de remédier au vide béant du cœur spleenétique. Quelquefois, elle lui donnait un aperçu non exhaustif de ses marasmes.
    Quelquefois, il subissait sa fureur, n’en saisissant jamais le sens ou le motif.
    La vie, fidèle à elle-même, s’écoulait dans l’ironie la plus totale. Jamais, Ô grand jamais, elle ne daigna faire preuve de cohérence.

     


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  • Eldalis m'a réveillée de ma léthargie, on dirait bien :p

    C'est un texte que j'ai écrit fin 2015 ; je dirais courant septembre/octobre. Je l'ai plusieurs fois repris, sans jamais le finir.
    Aujourd'hui, je me sentais de finir quelques choses, on dirait bien. 


     

    Dépression

     

    (OC : Neige Aarth)

    Un ciel d'un pâle violet s'étendait sur un canton désolé du centre de la France. Il y régnait en dictateur, aliénant une vie qui ployait sous une épaisse chape de plomb. Seule la légère brise faisait frémir le faubourg.
    Le paysage était disposé en teintes fuligineuses. Chaque couleur s'insinuait furtivement, guère criarde, du blé décimé à l'asphalte irrégulier, des arbustes frêles aux choux rancis.
    Pas même une trace nocive de l'humanité ne condensait ce calme sépulcral, trope d’un épais brouillard putréfactif, repoussant et prolifique. Cette image me confortait dans l’idée que la pire des vies ne fut pas la plus tragique, mais celle qui laissait le plus indifférent, - que l’on nomme plutôt errance qu’existence - et je reconnus là l’antipode de la Passion, de l’Amour et de l’Art.
    Non loin, une jeune femme s’ingéniait à refermer la porte de sa chaumière silencieusement. Pas même cette humaine à l'allure insouciante n'échappait à la Gangrène : la non-vie lui vouait un profond respect, et une affligeante impuissance.
    Elle émergea des artères taries. Les cailloux n'osaient pas émettre de couinements sous ses semelles.
    Les courants d'air n’étaient pas violents, mais polaires. L'automne était rigoureux, et ces bras nus, tant délicats que minces, se pigmentèrent de chair de poule. L'ingénue n'était vêtue que d'un t-shirt ample, qu'elle portait à l'instar d'une robe, tout juste assez long pour couvrir son postérieur. Dans un élan de raison, elle avait daigné garnir ses mains et ses avant-bras de longues mitaines grises, et ses mollets de bas.
    Les pompons suspendus à la fourrure de ses bottes se balançaient tels des pendules, au gré de ses pas aériens.
    La fille chassait de nombreux marasmes, qui la ramenaient régulièrement au bonheur de sa vie antérieure. Le goût de l'oubli emplit amèrement ses pupilles gustatives ; elle éprouva un saugrenu plaisir à cette sensation, ne se refusant pas à ce répit de pensées impudentes - mais une partie, un infime et ridicule simulacre d'elle, éprouvait un soupçon de frustration.
    La gangrène nie que le temps passe à une vitesse folle sous sa monarchie, éthéré, impalpable et monotone ; que, d'une prévoyance inquiétante, elle avait poli les semelles de la jeune fille, afin qu'elles se marient à l'accalmie étouffante de ces lieux.
    La gangrène, influente, insuffla à la demoiselle de réfuter le son du clocher, annonciateur de l'hiver. Ce mois de décembre décisif, deux ans auparavant ; la joie embryonnaire à la vue de quelques particules blanches parmi les nues - et cet heureux sentiment qui s'échappait de son âme à mesure que les particules abondaient.
    Elle n'avait plus aimé la neige, ni toute nature. Cette passion s'était évanouie, confusément et sans raisons apparentes.
    Elle n'avait plus aimé la compagnie et la solitude, qu'elle chérissait tant. Elle n'avait plus ressenti l'harmonie d'un être équilibré, ni l'ambition, et se caractérisa par une neutralité quasi-constante, et affligeante.
    Cet hiver, son coeur s'était gelé, et son visage s'était mu d'une sournoise ataraxie... Et plutôt que de réfuter l'intégrité de son existence, elle réfuta son passé.
    Rien ne semblait pouvoir interrompre la funèbre et pressante ascension du temps. L'oubli fit de seize ans une piètre seconde. L’oubli fit d’un humain conscient un papillon éphémère, naissant et mourant perpétuellement... Affolé, indécis, mais droit. Avançant péniblement, et bientôt sans repères, mais avec un affairement exemplaire.
    Ses iris furetaient, impassibles et sombres, dédaignant cet environnement trop familier.
    Il y a longtemps qu’elle n’avait pas pris plaisir à ces balades matinales, pourtant, elle n'avait pas cessé de prendre une marge de vingt minutes le matin, avant de se rendre au lycée, ne serait-ce que pour ne pas marquer de cinglante différence entre son ancienne vie et celle qu'elle menait alors.
    L'aube ternissait davantage les environs. Les arbres s’amoncelaient en de noires silhouettes dont les branches formaient un kaléidoscope de ramures. Des moutons de nuages s'agglutinaient à la verdure et camouflaient les champs agricoles, qui n'apparaissaient que par gerbes de jaune crasseux ou de vert fade. De temps à autre, elle percevait les croassements de quelques corbeaux, un bruissement dans les buissons de l'épaisse forêt qui bordait la route.
    La jeune fille s'assit sur la chaussée, au pied d'un lampadaire encore allumé. Ainsi adossée, elle releva le menton pour jeter un œil abattu à la voûte céleste. Une vague émotion l'envahit. Elle venait tout juste de remarquer le violet parme de ce dernier. L'expression de la lycéenne, d'ordinaire figée, changea un instant : elle écarquilla les yeux, qu'un de ces fugaces sentiments altérait parfois, et entrouvrit lentement ses lèvres gercées.
    « Peut-être que quelque chose me ressemble, et que je ne suis pas la seule à être si atone », songea-t-elle, en esquissant un léger sourire.
    Elle tendit le bras, comme pour attraper ce ciel-là, dont elle se prit d'une aussi singulière que subite affection.
    Bientôt, l'aube crût et rougit la campagne froide. Le doux parme était désormais diapré de tons chaud, et finit par se noyer parmi leur vivacité anodine.
    Elle avait abaissé son bras, et se sentait un peu pathétique. La réminiscence du bonheur qu'elle éprouvait à l'annonce d'une nouvelle journée ne fit que réhausser le sourire ironique qu'elle arborait. De son sac en tissu, elle sortit des lunettes rétro rondes. Elle les scruta quelques secondes entre ses mains, sans se souvenir de qui elles lui provenaient, et finit par ignorer ce détail, qui l’aurait probablement mise à quia si elle avait daigné y réfléchir. Elle les plaça sur son fin nez. Grâce aux verres, le ciel fut de nouveau froid, mais elle n'éprouva pas d'intérêt pour cette imposture.
    Autour d'elle, une quantité colossale de spectres s'était amassée. Ils semblaient jouer un rôle clé dans la quotidienne décadence de l'humeur de la fille - tant d'esprits déchus, affamés d'existence comme de nourriture. Leur enveloppe se distendait continuellement, difforme, muant tantôt en une silhouette humaine, tantôt en un halo épars, pétrifiée dans une expression d'affliction.
    À contrario des mânes, fluides et homogènes, les spectres se composent d'une infinité de corpuscules pourpres.
    « La Géhenne. »
    Malgré mon incapacité à lire les sentiments des âmes des morts, leur souffrance m'éventra subitement, traversant la diaphanéité de mon étrange corps - ni vivant, ni mort, ni humain, ni animal ; autre, inconnu -, qui se compressa de telle manière que je crus presque exploser d'une pression trop forte. Alors, je priai, caressant l'espoir d'apaiser ces âmes torturées. Ce phénomène surpassait de loin la télépathie : c'était une terrible empathie.
    Les émanations s’agitaient d'un entêtement enfantin sous les yeux de la fille, qui ne leur prêtait aucune intention, rivée sur son téléphone, qui peinait à capter quoi que ce soit ; j’aimerais pouvoir mettre exclusivement en cause sa mémoire défaillante. À mesure que le tohu-bohu des spectres allait, à mesure que son téléphone se refusait à charger sa page, son front se plissait nerveusement. Elle se releva brusquement, non sans jeter un regard furieux à la horde de spectres, et poursuivit sa marche d’un pas vif comme ceux des humains bourrus.
    « La… (elle emplit ses poumons d'air) ferme ! »
    Ses paroles eurent pour effet de faire cesser le tohu-bohu de la horde ; pourtant, la jeune femme n'était pas bien imposante.
    Déjà, la colère de la fille s'était apaisée, laissant place à son calme placide habituel. Elle soupira et disparut lentement dans la brume matinale.


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  • Je sens que je peux confier beaucoup de choses à Thérapie du Bonheur. Peu de personnes se perdront à la lire, et je leur fais confiance. 

    Extrait de mon journal


    A celui qui riait fort - et qu'on a tué

    (OC : Shikabane Junsee)

    (Groupe : The Ocean
    Album : Pelagial
    Genre : Post-Metal)


    Jour 174 (27/02/2017) :

    Il faisait noir.
    C'était le noir complet.
    Est-ce que j'ai quelque chose à tirer du noir ? Non. Meublons ceci.
    Un peu de musique.
    Dois-je mettre une musique que je connais bien, à laquelle j'associe des souvenirs ? Ou une musique à laquelle associer de nouveaux souvenirs ?
    Très bien ; replongeons dans le noir.
    La vie est étrange, n'est-ce pas ? J'ai peur de ce que peut bien être la vie... C'est-à-dire, une vie dans laquelle x a été assassiné ; une vie dans laquelle j'ai des fantasmes inappropriés ; une vie où je suis mal à l'aise durant une soirée.
    Une vie où je perds mon talent.
    Je radote. N'ai-je plus de maximes à écrire ? De vérités à traduire ? Non ; je n'ai plus que des questions, semble-t-il.
    Je me souviens de ce message
    x est mort
    x est mort
    x est mort
    x est mort
    x est mort
    Je me souviens que le mot "mort", quoiqu'il m'ait heurté la première fois que je l'ai vu associé à x, a fini par perdre de son sens. Je me souviens, il y a longtemps, avoir pris y dans mes bras, l'avoir sentie pleurer
    Mais est-ce assez réel ? Pourquoi est-ce si difficile à réaliser, même après avoir assisté à la cérémonie ?
    Est-ce que j'ai assez conscience que je vis ?
    [...]

    Jour 172 (07/02/2017) :

    J'ai l'impression que x est juste parti. Qu'il est juste parti prendre l'air un instant, un insupportable instant. 
    Mais x ne reviendra plus. x ne reviendra plus jamais.
    C'est cela que signifie le mot "mort". 


    Jour 171 (02/02/2017) :

    Le cercueil était blanc. Blanc d'innocence, blanc d'enfance, blanc d'une mort prématurée et blanc comme son cadavre. Il était blanc, et nous étions tous noirs. 
    Aujourd'hui, nous allons enterrer x. Faire les derniers adieux, rendre les derniers hommages. Je pleurerai sans doute les dernières larmes pour recueillir une nouvelle vision du monde : celle d'une vie cruelle et difficile, qui avait eu raison de x.
    Nous allons enterrer son sourire espiègle, son rire aiguë et communicatif, sa générosité et son impulsivité. Nous allons enterrer une partie importante de la vie d'une famille que j'aime profondément. Mais la peine de mes amis, elle, ne sera pas enterrée avant un moment et les souvenirs, jamais. 
    Nous avons tous changé. Nous voyons tous les choses différemment, et prenons conscience de ce monde chaotique. 
    Nous faisons plus attention à la mort, au sang, aux crimes autour de nous. 
    Et plus que tout, notre fragilité nous apparaît comme évidente. Les rêves, les projections que nous nous faisons sont sûrement plus des aspirations que des objectifs réalisables. À l'aube de la réussite, il se pourrait que la mort emporte tout.
    J'ai l'impression de revoir, ainsi. Que les couleurs sont aussi vives qu'elles l'étaient il y a de cela trois ans, et de me réveiller de ma léthargie. Demain, je ne serai peut-être plus là. Sûrement partirai-je sans avoir accompli ce pourquoi je suis née. Nous avons le droit de trouver la mort triste, mais je ne voudrais pas que ma mort soit vécue avec tristesse, peu importe la manière dont elle surviendra. 
    Aujourd'hui, j'ai réalisé qu'il y avait des gens que j'aime, que je souhaite rendre heureux et protéger.
    Je suis née pour rendre le monde meilleur ; je ne mourrai pas pour l'emplir d'encore plus de tristesse.

    Jour 175 (28/02/2017) :

    Parfois x j'ai l'impression
    Que je t'utilise
    « Je n'ai pas pu rendre mon devoir maison d'économie, j'étais à une cérémonie »
    « Je le connaissais »
    « Je vais en profiter pour voir y plus souvent et lui montrer que je suis là »
    « Je vais pouvoir justifier mon mal-être. Demander de l'affection me sera plus légitime »
    Parfois, j'ai honte. Je confonds des souvenirs ; des souvenirs qui n'étaient pas en ta compagnie, mais en celle de ton assassin. C'est si flou dans ma tête. Le temps, le présent, le passé... Tout ça finit par n'être que confusion, confusion insensée. 

    Jour 178 (05/03/2017) :

    L'autre jour, x
    J'ai cherché ton prénom 

    Je ne l'avais jamais cité que pour te critiquer.

    Jour 175 (28/02/2017) :

    J'en suis désolée. Je donnerais cher pour que tu sois encore là. Devant ton ordinateur, à traduire des animes pour toujours. J'ai encore la clé USB que tu m'avais donnée en mai dernier, avec Nagi No Asukara. Devant ma mine déconfite suite à ma rupture, tu avais voulu me changer les idées. Bien que je n'aie pas apprécié outre mesure cet anime, sache qu'il m'a remonté le moral. J'ai encore beaucoup de choses à regarder d'une très bonne qualité, grâce à toi.
    Lorsque j'allais voir y, tes fonds d'écran de nekomimi, de lolis, de yuri, la plupart du temps ecchis, défilaient sur le téléviseur de ton ordinateur, ce qui me faisait ricaner. Lorsque tu étais là, je me souviens de ton regard en biais, espiègle, tes « Oh non, elle est trop mignonne ! », tes « Haha ! » retentissants et communicatifs, ou ton obstination à différencier les yeux vairons des yeux hétérochromes.
    Je donnerais cher pour qu'on aille tous ensemble au cinéma, une dernière fois. Vite, avec ta voiture, comme une attraction, surtout sur les dos d'âne. On irait avec mon kigurumi et mon sac à dos tigre, et Ophélie avec sa peluche Rilakkuma, parce qu'on aime se faire remarquer, qu'on est clichés, sans vergogne. On irait même au Mc Do. Je pourrais croquer dans un hamburger carné, si cela te faisait plaisir.
    Juste pour être à Ω:1, il y a quelques années de ça. Que tu nous paies encore une glace ou une crêpe, des frites ou un Mc je ne sais quoi.
    En rentrant, on regarderait Dragons 2. On pourrait aussi aller refaire du Karting à s'en péter le dos, ou chanter dans la rue à Ω:2. Au moment de dormir, tu me prêterais même ton dakimakura de Ikaros. J'ignore pourquoi je me sentais bien avec Ikaros dans mes bras.
    Tout serait comme avant. y, x, u et un de ses mecs, et même w, au cinéma. Pas de a ; bien que ce garçon fasse le bonheur d'y, c'est parce qu'elle ne cesse d'être avec lui qu'on ne se voit plus, elle et moi. Ça, tu l'avais sans doute remarqué. Tu me demandais pourquoi je ne venais pas plus souvent... J'aurais aimé, x. Comme j'aurais aimé.
    Juste que tout soit comme avant. De bonbons, de gâteaux, d'animes, de rires, de danses loufoques ; trêve de sang, trêve de meurtre, de mensonges.
    J'ai si mal au coeur ; parce que tout ça ne sera plus jamais comme avant, toutes ces choses qui furent mon bonheur d'adolescente ne sont définitivement plus.
    Le temps s'est comme arrêté en 2015. Je n'arrive plus à regarder le temps en face depuis lors. Je vis en rétrospective, ou simplement en me répétant que le temps passe trop vite. Le temps est une poule à laquelle on a coupé la tête, et elle pisse le sang de partout depuis que tu es mort, x.

    Jour 174 (27/02/2017) :

    [...]
    Avec n, hier
    Il y avait comme un sentiment de désertion
    Nous étions les deux seuls humains restants de Ω:3
    Alors on essayait de faire remarquer notre présence
    Des yeux
    Des yeux
    Des yeux
    Une présence qui reste
    Qui résiste au temps, un temps
    Puis qui, comme nous, disparaîtra...
    Il y a quelque chose que je souhaite laisser sur Terre
    Une histoire
    Celle d'Intro Spectrum
    Mais Intro Spectrum, l'histoire où tout est possible,
    Connaîtra-t-elle ne serait-ce qu'un chapitre ?
    Et si je réécrivais ?
    h
    h
    h
    h
    Je voudrais que
    Tu me complimentes
    Que tu sois fier de moi, en quelque sorte
    Est-ce que j'aime h
    Ou l'image qu'il me renvoie ?
    Quelle importance, de toute manière.
    Les choses sont étranges
    Dieu qu'elles sont étranges
    J'ai aimé m, vraiment
    Mais je ne m'en souvenais plus
    J'ai besoin de retrouver mon essence
    Rechercher mon moi profond
    Perdu dans le quotidien

    La nuit, la vie est bizarre sans bras dans lesquels se blottir

    Je dois réécrire
    Je dois réécrire
    Je dois réécrire


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  • Il s'agit d'un texte que j'ai écrit fin septembre en réaction à mon improductivité et mon insatisfaction. Depuis lors, j'ai l'impression d'avoir fait d'assez gros progrès sur moi-même, quoique le plus gros reste à faire : reprendre le réflexe d'écrire. Je sais que j'ai déjà clairement repris celui de dessiner, et que je me fais pas mal violence sur l'écriture. 
    Je ne serai sans doute pas allée aussi loin dans ce travail de moi-même si je n'avais pas rencontré quelques artistes à la productivité surpassant de loin la mienne. Je me suis sentie dépassée par le courant de la vie active, oisive dans mon lit, et j'ai souhaité être bercée par autre chose que par mes draps. 

    J'aurais donc un nombre assez conséquent de dessins à poster. Peut-être que ça ramènera au blog un peu de sa vivacité passée ? J'ai de quoi largement remplir cette rubrique dessin, croyez-moi ! 

    Mon petit univers reprend de ses couleurs. Petit à petit. 


     

    Mon père, c’est l’écriture ; ma mère, le dessin.
    Je ne saurais discerner mon délaissement du leur. Sûrement à cause de la relation fusionnelle que nous entretenons. Et je préfère être incomplète, maudite par ces membres fantômes, qui, chaque seconde, me rappelleraient leur affligeante absence, que de me complaire dans un quotidien où ils n’auraient pas leur place.
    Peut-être que par réflexe de survie, s’il s’avérait que les sensations en découlant devinssent intenables, alors, seulement, au paroxysme affliction, je me remettrais à faire de l’art avec zèle. Or, je ne souffre pas. Je me sens ignorante et inculte plus que jamais, je me sens contre-productive et inutile, ce sont mes maux, j’entends, mais je suis parvenue à construire un bonheur en entrevoyant ma mère de manière mensuelle, et mon père, de manière semestrielle. Un bonheur complaisant, fait d’innombrables concessions, capricieux et versatile ; en somme, imparfait, et dont les exigences m’empêchent d’être maçonne.
    Il y a de cela un an, un an seulement, j’aurais eu le courage d’aller au devant du bonheur (« Quel est le sens de cette utopie que recherchent d’arrache-pied les Humains ? N’est-elle pas par elle-même contre-productive ? Ne me rend-t-elle pas dépendante de mes compères, m’arrachant là à mes passions ? N’y a-t-il pas bien mieux à faire que de construire son propre bonheur ? ») pour la grâce de mon autonomie, pour la grâce de mes mains, que je souhaite voir façonner pléthore d’œuvres, dont j’ai besoin de tirer de la fierté, mais qui, finalement, sont terriblement creuses, terriblement paresseuses.
    A l’instant T, je ne peux prétendre à la qualité de vie que j’avais acquise par le passé, un rien plus fugace que mon malheur. Quand je songe à cette période-là, c’est toujours avec admiration : l’intellect en formation, critique, aiguisé, les valeurs et la force du chevalier, le don de transposer quoi que ce soit sous forme artistique. Je ne coulais pas une vie tranquille, et on vit peu de vies tranquilles  se confondre dans l’art. Je l’avais trouvé par hasard, dans une ville que je ne qualifierais pas de calme, entre deux ruelles boisées et lumineuses, au milieu des passants, divers et pressés ; ce phénomène que j’ai nommé « le pinceau irisé de la création », et que j’adoptais aussitôt au détriment de l’éponge noirâtre qui inondait mes feuilles de ses marasmes – mais au moins, qui les inondait. Et, toujours par hasard, je l’avais perdu, pour me retrouver tant démunie du merveilleux pinceau que de l’éponge fuligineuse ; au passage, j’avais également, malencontreusement, égaré mes sentiments, mes émotions, mes souvenirs, la chaleur d’un ami, le plaisir d’une passion, mes raisons de vivre, comment aimer, et tant d’autres richesses...
    De la sorte, ma vie semblait toujours avoir été guidée par des aléas maladroits et aléatoires, ainsi l’unique période durant laquelle ma condition m’a semblée aller d’elle-même correspondait à celle où je babillais encore. Je ne donne pourtant pas dans le déterminisme, mais quelque part, mon libre-arbitre en lui-même paraît se rapprocher du stoïcisme, impartial : c’est-à-dire qu’il n’est en aucun cas lié à mes sensations corporelles... Ou alors, ce stoïcisme et ces sensations formeraient deux libre-arbitres indépendants l’un de l’autre, dont l’un, de toute évidence, parviendrait davantage à se faire respecter, aidé par les sensations corporelles, tandis que l’autre puiserait plus sa force en des notions plus abstraites, tels principes et souvenirs.
    Artiste à mes heures bénies, et d’une oisiveté incoercible à mes heures perdues. Lectrice à temps partiel, et philosophe auprès des êtres humains les plus insensés. Tout ce qui demande à ma concentration d’être inflexible, à mes mains de pianoter ou d’esquisser activement, à mes yeux de déchiffrer, se voit désormais relégué en-deçà bien des occupations.

    Aujourd’hui, j’ai feint la motivation, rongée par la jalousie de la productivité de mes compères, et déjà, je sens la paresse m’envelopper avec volupté, me vider de mes forces, injecter mes yeux de sang et abaisser mes paupières.
    Demain, demain seulement, je serai maçonne.

     


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  • J'ai l'impression d'être amie avec des personnes
    que je connais depuis à peine 10 jours.
    C'est agréable. 

    Je n'ai plus l'imagination en effervescence. 

    Je me souviens de son visage
                                  de son nom
                                  de son sourire
                                  de sa voix
                                  de l'ambiance qu'il mettait dans la classe...
    De mon imagination fertile. 
    Dépressive, mais fertile. 

    Je me souviens combien j'aimais Onwa
                                                                 Drug
                                                                 Ed
                                                                 Brade
                                                                 Junsee
                                                                 Gabriel
                                                              et tant d'autres.
    Leurs histoires
                               je les oublie 
                                                                quelque peu...
    J'essaye de les faire revivre, parfois.
          Je crois que je dois réécrire. 
                   Est-ce que j'ai des choses à exprimer ? 

    Et parfois je sens que je vis dans un monde qui m'ignore
         Que toutes ces entités me paraissent figées,
    alors même qu'elles bougent. 

          Quelqu'un élève la voix
                  Alors je l'entends. 
     S'il vous plaît, élevez la voix
    et sortons ensemble de la torpeur.

    Tous ensemble... 
           Mais déjà, le silence retombe
                      J'ai besoin d'air
    Cette pièce surchauffe
        Mes cheveux sont gras, je le sens. 
             Et mes paroles deviennent 
                  incohérentes et
                             sans
                               structure.
    Oniriques, comme celles qui nous semblent
    sensées dans nos rêves.
              Les spectres ont installé ici 
           Leur
                        sauna
                                          géhennique 
    La paresse, la nonchalance
                m'envahissent
          Dis-moi
                        quelque chose
          Dis-moi                 n'importe quoi
    que toi aussi
                           tu les vois dans leur 

    sauna
                ces vilains spectres qui me volent mon
    énergie 
          Et là 
    - Il s'appelle Arthur, et - 
         Il me dévisage, mes rêveries psychédéliques,
    mes cheveux gras, et moi. 
             Pourrait-il arrêter, avec son air aussi béat
    que méprisant ?


    J'ai trouvé que ce texte allait bien avec ce blog brumeux et désertique. 
    Il sort du blizzard, fébrile et timide nimbe, et se dissipe aussitôt
    Sa présence se fait aussitôt oublier, comme si des volutes d'opium avait eu raison de lui et le replongeaient dans l'inconscience dans laquelle il aurait toujours dû demeurer

     


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